5 décembre 2018 | Droit de l'e-réputation

Droit à l’image d’un mannequin : quelle limitation des droits dans le temps ?

Certaines règles élémentaires du droit à l’image des personnes, quel que soit leur statut, particulier ou professionnel de l’image (mannequin en l’occurrence) viennent d’être rappelées dans une ordonnance de référé du Tribunal de grande instance de Paris.

Quels sont les faits ? Un mannequin avait donné son autorisation par contrat pour l’exploitation de l’image de sa personne dans une vidéo publicitaire. Le contrat stipulait précisément que cette cession de droit sur son image était limitée à deux ans. Or, le mannequin a constaté que, plus de deux ans après la signature du contrat, la vidéo était toujours en ligne sur le site de la marque et sur Youtube.
L’écueil est que la marque a commencé à exploiter la vidéo en question tardivement, estimant que la durée de deux années d’exploitation commençait à cette exploitation et qu’elle n’était donc pas dépassée.

Le juge des référés va trancher différemment et considérer que le délai contractuel de deux ans devait être calculé à partir de la date de signature du contrat. Cette solution nous semble assez logique, eu égard aux droits mis en œuvre.

L’image : un attribut de la personnalité

Il faut rappeler que l’image d’une personne – même lorsque celle-ci en fait commerce comme un mannequin ou un modèle – constitue un attribut de sa personnalité, par définition inaliénable. La jurisprudence a donc toujours été très vigilante sur les cessions de droits à l’image, considérant qu’à défaut de permettre de révoquer ces droits à tout moment, ils ne pouvaient être indéfiniment cédés. C’est pourquoi la plupart des contrats de cession d’image ne peuvent durer qu’un maximum de trois ans. Ici donc, le contrat stipulait deux ans.
Il ne faut jamais perdre de vue que cette cession sur une durée courte est l’aménagement d’un droit par principe inaliénable, essentiellement révocable. La durée concédée ne saurait dépasser celle prévue au contrat, à partir du moment où la personne concernée a exprimé sa volonté de céder de tels droits, c’est-à-dire au moment de sa signature. Peu importe dès lors que la marque ait tardé à exploiter la vidéo. En d’autres termes, il ne s’agit pas de regarder le contrat de cession d’image du côté de l’exploitant qui se voit conférer un droit d’exploiter la vidéo durant deux années à partir de la date qui lui convient, il s’agit de considérer le contrat comme la cession par une personne de son image pendant deux années à partir du moment o elle donne son accord : c’est le caractère personnel de l’image qui l’emporte.

La solution eut-elle été différente, si le contrat avait spécifié le point de départ du délai ? Sans doute puisqu’alors, le mannequin aurait signé en pleine connaissance de cause. On voit ici, au passage, l’importance de clauses bien conçues dans un contrat.
Une ordonnance de référé ayant pour but de faire cesser un trouble, sans trancher sur le fond du litige, la marque a été condamnée à consigner une somme de 4 000 €, à valoir sur les éventuels dommages-intérêts que les juges du TGI prononceront lorsqu’ils traiteront de l’affaire au fond.

Voir l’ordonnance de référé en date du 16 novembre dernier sur le site Legalis.net : www.legalis.net

Photo : Envato

Didier Frochot

Didier Frochot est titulaire d’une maîtrise de droit privé et d’un DESS de gestion. Présent dans le secteur de l’information-documentation depuis 1982, il est Consultant et Formateur depuis 1984, il collabore à la rubrique Droit du mensuel professionnel Archimag depuis 2003. Il fut par le passé Responsable pédagogique du cycle supérieur de l’INTD/CNAM pendant 10 ans (1989-1998).

Spécialités
E-réputation – Propriété intellectuelle, Droit des technologies de l’information, de la documentation et des médiathèques, Données personnelles et RGPD – Technologies de l’information (Internet/Intranet : recherche d’informations conception de sites) – Documentation – Traitement de l’information – Information, documentation et veille juridiques.

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