Un arrêt de la chambre criminelle de la Cour de cassation du 1er septembre 2020 vient préciser quelques subtilités sur le caractère diffamatoire ou non de l’insertion d’un lien hypertexte renvoyant vers un autre contenu en ligne (voir cet arrêt sur l’excellent site Legalis.net, en attendant qu’il soit publié sur Légifrance).
Le contexte : distinction entre société et dirigeant
Peu importent les faits précis, ce qui compte essentiellement pour nous est le contexte.
Un site internet avait publié un article sur une affaire politico-financière, évoquant le rôle joué dans celle-ci par le dirigeant d’une grande société française. Un lien hypertexte dans le corps de l’article renvoyait à un article du Monde qui précisait les conditions de ce financement suspect. La société – qui porte le nom de son dirigeant – a poursuivi le site internet en diffamation au motif que, via le lien hypertexte vers l’article du Monde, il y avait allégations de faits « portant atteinte à l’honneur et à la considération » (définition même de la diffamation) de la personne de la société.
L’arrêt de la chambre criminelle
Tout comme la cour d’appel de Paris dans son arrêt du 20 février 2019, la chambre criminelle de la Cour de cassation rejette la qualification de diffamation. En effet, selon la Cour :
« la diffamation visant une personne ne peut rejaillir sur une autre que dans la mesure où les imputations diffamatoires lui sont étendues, fût-ce de manière déguisée ou dubitative, ou par voie d’insinuation. »
En clair…
C’est cette distinction importante qui nous paraît ici intéressante à retenir. Diffamer un dirigeant de société pris dans sa personne physique, à raison de ses agissements personnels, n’est pas diffamer la personne morale de sa société. C’est exactement ce qui s’est passé en l’espèce : l’article d’origine, de même que l’article du Monde, visait le dirigeant dans sa personne et ses relations politiques personnelles. La société – même si elle porte le nom de son dirigeant – ne pouvait se considérer comme diffamée ; seul son dirigeant pouvait l’être, et il était donc le seul à pouvoir poursuivre. Ce qui n’a pas été le cas dans ce contentieux.
Voir toutes nos actualités sur les Délits d’information dont la diffamation est l’un des plus courants.